petits périples

Hélène Raymond


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Icebergs et potagers

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Bonavista, c’est une péninsule terre-neuvienne. Une des multiples côtes hachurées, découpées qui, si on les déroulait sur un fil, totaliseraient 29 000 kilomètres. Terre-Neuve, ce sont des caps, des anses, des baies, des paysages magnifiques.  C’est aussi la roche dure, les krummholz, ces arbres  fouettés par le vent jusqu’à ne plus  jamais se redresser et, de temps à autre, surprise!  un potager.     IMG_4181  IMG_4251

Pour récolter un peu de verdure par là-bas, il  faut faire preuve d’une infinie patience. D’abord  pour «faire de la terre», pour  avoir suffisamment de compost et enfin, il faut espérer l’été qui vient plus tard qu’ailleurs. Début juillet, sauf exception, on voit davantage les étiquettes identifiant les rangs que les plantes!  Il n’y a pas que la mer qui ait nourri Terre-Neuve. Les familles de pêcheurs cultivaient leurs légumes, parce qu’il fallait se nourrir mais aussi parce que la terre fournissait une bonne dose d’autonomie, face à la voracité des marchands de poisson.

Les anciens récoltaient racines, choux et pommes de terre. Ce que plusieurs font encore. Mais  les jardiniers plus audacieux (ou plus gourmands) ont largement étendu les cultures aux salades, épinards, crucifères (comme les moutardes). Et les plus chanceux mettent à l’abri, dans une serre, tomates, concombres, poivrons; tous ces légumes qui préfèrent la chaleur. Lire la suite


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Paloquemao, le grand marché de Bogota

Quand on aime qu’un marché reflète la culture locale, Paloquemao nous comble. Au centre-ville de Bogota, sur un très grand espace, on brasse des affaires, pour sa consommation personnelle ou la revente.

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Il est à des lieues de ce qu’on voit généralement quand on refait le décor pour accueillir des touristes. À Bogota, vous observez et partagez ce que vivent les Colombiens. DSCN1090

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Des fruits à goûter…des yeux.

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Tomates de arbol ou tamarillos. De la famille des solanacées. Rouges ou jaunes, on ne mange pas la pelure. Dans son «Guide des fruits et légumes exotiques et méconnus» (1987!), Jean-Louis Thémis les suggère en omelette.

Ils sont partout! Sur une rue, les marchands ambulants les proposent déjà coupés;  un peu plus loin, ils les  pressent pour en tirer le  jus.  Grâce à leur débrouillardise, ils extraient l’eau sucrée  des bâtons de cane à sucre  pour obtenir un sirop édulcorant qui adoucira toutes ces boissons sans alcool. Ils  transforment les mangues en «spaghettis», inventent des systèmes de réfrigération. Les fruits trônent au cœur des rues, sur les places publiques, le long des grandes artères. Vous le savez, c’est  l’exotisme…à vos risques et périls. L’eau, la glace, la chaleur de plomb, Lire la suite


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Neal’s Yard, la campagne britannique au cœur de Londres

 

P1130697Je me rappelle de la découverte. Cette boutique magnifique, un peu en retrait de Borough Market. Ça fera quatre ans, presque jour pour jour. Un samedi d’avril qui sentait le printemps.

On s’était frayé un passage dans la foule compacte qui fréquente ce très vieux marché la fin de semaine, on avait partagé un grilled-cheese, humé l’odeur de ces paëllas géantes qui nourrissent tant de gens, salivé devant tous ces aliments, jeté un coup d’œil aux légumes locaux puis, en sortant du marché nous avons aperçu Neal’s Yard Dairy.

Ce que vous voyez plus haut trônait à l’ entrée et annonçait le meilleur. À l’intérieur, une première pièce qui laisse deviner l’activité de la ruche, derrière. Puis, cette salle où s’activent des dizaines de vendeurs pour, encore une fois, faire goûter, trancher, peser, vendre ces fromages artisanaux d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande. Sélectionnés un à un, affinés tout près, dans des atmosphères strictement contrôlées des caves d’affinage de Bermondsey. Impossibles à voir de la rue, elles ont été aménagées il y a très longtemps, sous la chaussée. Les fromages sont ainsi maintenus à  température constante et sous  humidité constante.

Plus saisissants encore : les étalages. P1130681 Lire la suite


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Bogota – Medellin- Bogota

BOGOTA-MEDELLIN-BOGOTA

C’est une toute petite fenêtre d’un peu plus de dix jours sur une histoire immense, des climats variés et une cuisine qui s’est adaptée à toutes ces réalités géologiques, géographiques et climatiques. L’Atlantique; le Pacifique; le soleil de l’équateur, les nuits fraîches, voire glaciales; les estuaires de tous ces rios; le début de la cordillère des Andes et toutes les variations en altitude. Un métissage unique au monde : autochtones; descendants d’esclaves africains, d’espagnols, d’européens; yeux et peaux foncées…sourires à l’infini. Au moment de repartir, ce sera encore une fois avec le sentiment d’avoir ouvert une autre porte sur un coin du monde et ne pas avoir envie de la refermer. Malgré son passé tourmenté, ses violences et peut-être parce qu’on y sent, chez plusieurs,   cette envie très forte de vivre  autre chose.  Rares sont les  pays où on vous remercie d’être là. C’est le cas à Bogota et Medellin où nous nous sommes posés. Lire la suite


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Des Amériques et de Turquie

La plupart des aliments ont une histoire qui nous transporte ailleurs. Parce qu’ils ont eux-mêmes voyagé avant de parvenir dans nos assiettes. Même  les plantes sauvages des forêts gaspésiennes, abitibiennes, de bord de mer peuvent nous entraîner en Scandinavie et jusqu’en en Turquie, où on mange la salicorne en salade. Il n’est pas rare de la voir sur les marchés d’Istanbul et parmi les plats du meze . DSCN9675 (2)

Les échanges se sont amorcés depuis bien longtemps; les épices et les herbes ont soigné, relevé la saveur des plats et souvent facilité leur conservation. Les Basques ont enrobé leurs jambons dans les piments « Gorria »; un d’entre eux s’appelle aujourd’hui le piment d’Espelette. Certaines herbes, plus fortes en huiles essentielles, ont connu des usages thérapeutiques avant d’être considérées comme des plantes aromatiques. En fait, épices, herbes, fruits et légumes se sont doucement intégrés dans des cuisines à des milliers de kilomètres de leurs origines. Les tomates sont devenues saveur quasi universelle. Elles poussent partout mais ne goûtent pas la même chose parce que la façon de les cultiver et  de les apprêter change selon l’endroit.

Ce qui me dérange et que j’exprimais dans Goût du monde ou saveurs locales?, ce ne sont pas ces échanges, vieux comme le monde mais plutôt la standardisation et cette marchandisation des saveurs qui tend à uniformiser les plats. Turcs, Mexicains, Argentins, Anglais ont tous leurs recettes de légumes au vinaigre. Pourquoi devoir tous nous convertir au même ketchup?

Aujourd’hui, en rentrant de cette découverte marquante avec la Turquie, je veux vous raconter quelques légumes qui ont traversé les mers, des océans et les siècles et qui sont devenus des symboles culinaires grâce à l’usage qu’en ont fait les cuisiniers des sultans, aux  gestes des agriculteurs et des marchands et à ces millions de femmes qui ont su se les approprier . Des légumes qui ont survécu parce qu’on a su conserver leurs semences, observer et reproduire des croisements fortuits puis,  sciemment pensés. Ils ne sont pas uniformes; ni dans leurs variétés ni dans leurs usages. En voici 5 qui, avec la dinde qui a curieusement donné son nom anglais au pays, ont quitté les Amériques pour parfumer des plats apprêtés aux confins de l’Europe et de l’Asie.

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Istanbul, un jour de Baïram

24 septembre, rendez-vous avec les saveurs d’Istanbul

C’est jour de Baïram. Dès les premières minutes de notre rencontre, Elif, notre guide pour la journée, affirme qu’elle n’a jamais vu sa ville aussi tranquille. Sans être déserte, Istanbul  est calme, quasiment silencieuse par endroits. Les Stambouliotes l’ont désertée et sont rentrés dans leur famille. Les plus fortunés sont à la mer. Au cours de la journée, elle fera provision de loukoums pour ses parents qu’elle rejoindra, dans  la nuit. Ils l’attendent à la maison de campagne. Pour les non-musulmans, cette grande fête est aussi une occasion de retrouvailles.

Mon tour gourmand d’Istanbul a été réservé sans savoir qu’il s’agissait d’un jour férié. L’entreprise touristique  a tout de même décidé de tenir l’activité, même si certaines des boutiques à visiter ont fermé leurs portes. IMG_1020Il y aura toujours une solution de remplacement et, en prime,  un aperçu du sacrifice du mouton. Le retard accumulé au fil des heures nous permettra aussi  d’observer le coucher de soleil sur le Bosphore devant cet intense trafic maritime où cargos, paquebots, traversiers remplis de passagers, chaloupes et petites embarcations se croisent. À la tombée de la nuit, quand les dômes des mosquées vont s’illuminer les uns après les autres, que la lumière des bateaux va se mettre à danser sur le Bosphore et que des coins de la promenade sur les quais vont s’éclairer grâce aux lanternes de ceux qui font griller des maquereaux sur des poêles au charbon nous allons nous quitter, saluer ces « étrangers », réunis pendant une dizaine d’heures, unis par la même curiosité et une certaine de joie de vivre. Lire la suite


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Se désaltérer à Istanbul

IMG_5056Même si Coca Cola et ses dérivés sont présents un peu partout à travers la ville, dans les machines distributrices comme dans les frigos des épiceries de quartier, il existe encore plusieurs manières de boire « local » et de faire quelques découvertes pour le moins originales.

EAU : essentielle à la vie et à l’énergie (buvez librement, on trouve des toilettes publiques autour de tous les grands monuments). On la boit toujours embouteillée et il est recommandé de la décapsuler soi-même. Même les Stambouliotes boiraient, pour la grande majorité, de l’eau embouteillée. On dit toutefois qu’à l’entrée des mosquées, l’eau des ablutions serait potable (je n’ai pas poussé plus loin la vérification).

Effet direct de cette consommation : des montagnes de plastique se retrouvent aux ordures. Ce qui me semble plutôt ironique dans cette ville où, dès le VI siècle, les Romains ont construit, en cinq ans, une citerne municipale qui recueillait l’eau captée plus haut dans la montagne pour l’emmagasiner sous la terre dans un réservoir qui contenait de quoi abreuver 100 000 habitants! Une merveille de conception que l’on peut visiter et dont les cinéphiles se rappelleront (des scènes de Bons baisers de Russie ont été tournées à la Citerne Basilique et l’équipe de Inferno, de Dan Brown y aurait également travaillé; à la blague, les guides mentionnent le fait que vous la visitez avant que ça ne devienne « infernal » puisque Tom Hanks y a mis les pieds!). Lire la suite


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En espérant le retour de la morue

DSCN8729Il est curieux de se dire que les choses sont ainsi depuis des siècles. Que dès le moment où les Européens ont mis le pied sur les côtes de ce qu’on appelle aujourd’hui Terre-Neuve et Labrador s’est imposée cette idée d’effectuer une première transformation pour permettre l’approvisionnement des  marchés. Après tout, il fallait bien que la morue se conserve à partir du jour de pêche jusqu’à consommation.  Et c’est le sel, qui servait déjà à la conservation des aliments qui allait permettre le transport.  Un salage contrôlé, jumelé à un séchage au grand vent et au soleil, eux-aussi savamment étudiés. Sans doute maîtrisés après  plusieurs ratés. L’audace, la détermination et l’intelligence des humains allaient faire le reste.

Puis, les marchands sont venus et revenus pour mieux organiser le commerce. Du continent européen, des Îles Anglo-Normandes, ils se sont établis en Gaspésie avec leurs comptoirs de commerce. À terre et dans les barques, les pêcheurs ont peiné jour après jour pour nourrir leur famille. Ils ont  développé toutes sortes d’engins de capture. Palangre, ligne de cale, trappe, représentent  l’ingéniosité d’avant les excès de l’industrialisation, les pêches excessives, l’effondrement des stocks.

Il n’y a plus de morue. En tout cas plus assez pour faire vivre la tradition et remplir nos assiettes de poisson local mais, en Gaspésie, quelques irréductibles qui se comptent sur moins de doigts qu’en contient une seule main, perpétuent la technique de préparation de la morue salée-séchée, héritage des marchands  jersiais.  La Gaspé Cured s’en inspire gaspecured.com . Quand  je suis arrivée à Sainte-Thérèse-de-Gaspé, chez Lelièvre, Lelièvre et Lemoignan, une dizaine d’hommes s’affairaient à étaler la morue sur les vigneaux: ces installations artisanales faites de pieux d’environ un mètre  coupés dans des arbres de petit diamètre sur lesquels est fixé un treillis à grosses mailles. Et sur ce treillis, ils étendaient la morue ouverte en deux, taillée pour être bien plate de manière à sécher le plus également possible.DSCN9091 Lire la suite


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Chère Gaspésie

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J’aime la Gaspésie depuis toujours. Pour les vacances en famille quand on partait «vers l’est», en direction des Maritimes ou de la péninsule. Pour la famille de ma mère, originaire de Percé et son histoire qui puise une part de ses origines entre les Îles Anglo-Normandes. Pour ses paysages, son arrière-pays abrité et forestier et sa côte découpée. J’aime la Gaspésie pour les Gaspésiens. Je peste, de temps à autre, contre ses quelques terrains négligés, ses épiceries-dépanneurs, la baie de Gaspé qui pourrait être si belle si…mais j’y reste profondément attachée.

 

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J’y suis retournée. Du côté de la Baie-des-Chaleurs cette fois. Pour cinq jours «intenses» (si on exclut les 15 heures de déplacement, il en reste encore moins). Intense…vous me direz que ce mot est à la mode mais c’est celui qui convient le mieux. Cinq jours de cette intensité qui fait vivre chaque minute, les yeux et les oreilles grands ouverts. Lire la suite