Je pars bientôt. Dans quelques heures, je m’en retourne à Turin où, depuis quelques années, je croise des gens de la Terre. Ceux d’ici, ceux d’ailleurs. Ils ont en commun de résister à la mondialisation en bataillant pour la diversité et l’alimentation telles que prônées par Slow Food, cette alimentation «éco-gastronomique» qui met de l’avant trois mots: Bon (pour la qualité), Propre (pour le respect de l’environnement) et Juste (pour la dignité avec laquelle on traite ceux et celles qui nous nourrissent).
En allant là-bas, au fil des ans j’ai rencontré des agriculteurs qui, sur cette si longue route de la soie, réimplantent des cultures qui ont si longtemps été associées au commerce avant de frôler l’extinction; une pomicultrice russe, émue de me parler de ce chercheur néo-écossais qui venait à leur rencontre pour découvrir des variétés résistantes au froid; Barbara Abdeni Massaad, qui connaît la culture alimentaire de son Liban natal comme personne; des Samis, de Norvège, qui vivent près de leurs rennes à demi-sauvages (ou à demi-domestiqués?); Bineta la Sénégalaise qui fait revivre le «poulet bicyclette»: celui qui s’agite toute la journée autour des cases pour s’alimenter et qu’il faut réapprendre à manger, pour s’affranchir des importations et de la dépendance qui vient avec. J’y ai vu des gens d’ici aussi, débarqués pour promouvoir le sirop d’érable, la sarriette d’Acadie, le saumon sauvage de la Colombie-Britannique.
J’y serai pour toute la durée de l’événement. Cinq belles et longues journées. Du 22 au 26 septembre. À redécouvrir Turin dans ses musées et ses palais mais surtout dans la rue. Parce qu’en 2016, pour célébrer son dixième anniversaire et sa sixième édition, Terra Madre se déploie partout. Jusque dans ses institutions culturelles. On nous prévient déjà, nous les journalistes, que les déplacements seront particulièrement exigeants. Slow Food souligne donc ses trente ans d’existence et les vingt ans du Salone del Gusto (une impressionnante foire alimentaire des terroirs ), en revoyant de fond en comble l’organisation de sa manifestation.
Cette année encore, les paysans y viendront par milliers, en provenance de 150 pays. Pour prôner la diversité et faire preuve de leur détermination à résister. À bientôt!